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15 mars 2016

Quelles conséquences pénales pour une petite mandale?

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« Les gars, attention à celui là, il réfléchit avec les bras »

Et si nous y réfléchissions à deux fois avant de sortir la boite à gifles ?

S'il est de notoriété commune que les marrons et autres parpaings font parti du folklore du rugby, ces gestes peuvent et sont de plus en plus susceptibles d'engager la responsabilité pénale de leur auteur.

En effet, qu'ils aient lieu sur un terrain de rugby, ou dans n'importe quel autre endroit, ces gestes restent ni plus ni moins que des actes de violences volontaires (autrefois appelées "coups et blessures") réprimées aux articles 222-7 et suivants du Code pénal. Il s'agit ni plus ni moins que de qualifier pénalement des actes de violences qui n'ont plus rien à faire dans le monde du rugby et qui mettent en danger les joueurs qui en sont victimes.

Ce qu'il faut retenir de ces dispositions est très simple, ce n'est pas le geste en lui même qui conditionne la gravité de la peine, mais bien ses conséquences, les séquelles dont souffre la victime. En effet, le dommage subi par la victime conditionne l'étendue de la sanction de la manière suivante :

  • En cas d'absence de lésion ou de blessure, la peine encourue est de 750€ d'amende.

  • En cas d'incapacité totale de travail (ITT) ayant une durée inférieure ou égale à 8 jours, la peine s'élève à 1500€ d'amende (3000€ en cas de récidive).

  • Pour une ITT de plus de 8 jours, l'auteur risque jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 45 000€ d'amende.

 Enfin dans les cas les plus graves, si la victime subit une mutilation ou une infirmité permanente, l'auteur risque 10 ans d'emprisonnement et 150 000€ d'amende, et 15 ans d'emprisonnement en cas de violences volontaires ayant entrainé la mort sans l'intention de la donner.

Nous nous retrouvons donc face à un constat, ce n'est pas le parpaing qui compte, mais bien les séquelles qu'il laissera. Un même acte, en fonction de ses conséquences pourra entrainer une sanction pénale plus ou moins grave. Pour faire simple et imagé, un même marron n'aura pas les même conséquences juridiques s'il ne cause pas de dégâts particuliers, que s'il casse le nez de celui à qui il est gentiment distribué.

Certains pourraient dire que les joueurs de rugby acceptent les risques inhérents à la pratique du sport, et que parmi ceux-ci on trouve le petit coquard « souvenir » gentiment laissé par le talonneur adverse quand l'arbitre à le dos tourné. Cet argument a cependant été refusé par la chambre criminelle de la Cour de cassation dans une décision rendue en date du 5 août 1997, qui condamne un acte de violence n'ayant pas été vu, et donc sanctionné par l'arbitre.

Le coup de poing en réponse à un mauvais geste de l'adversaire n'est pas non plus exclusif de responsabilité pénale, comme a pu le préciser la cour d'appel de Toulouse, dans une décision du 28 janvier 1999. « Se rend coupable de coups et blessures volontaires celui qui a, en dehors des limites du jeu, violemment agressé par derrière un adversaire alors qu'il ramassait un ballon et qui affirme avoir voulu punir physiquement la victime pour un prétendu mauvais geste qu'elle aurait accompli sur un de ses coéquipiers ».

Il est indéniable que notre société devient de plus en plus procédurière, et il n'est pas rare de voir aujourd'hui des joueurs victimes de violences aller déposer plainte à la sortie du vestiaire. C'est un choix qui est absolument légitime! Les temps ont changé et les risques ne sont plus non plus les mêmes.

En effet, il suffit de comparer le gabarit moyen des joueurs des années 70 et ceux que l'on peut observer de nos jours le dimanche après midi sur le pré. Musculation, poids.. à partir d'un certain niveau, les joueurs deviennent rien de moins que des machines, aux performances physiques de plus en plus impressionnantes. Quand un 2nd ligne de fédérale soulève plus de 100 kilos en développé couché, on imagine bien les dégâts que pourrait causer un coup de poing bien placé. Moi je passe mon tour.

N'oublions pas que gagner un duel offensif ou défensif reste bien plus plaisant que d'en coller une, que cela n'expose à aucune poursuites pénales, et que c'est par un heureux hasard que c'est en gagnant ses duels qu'on finit par gagner le match.

Walter Spanghero disait « Heureusement qu'il y avait mon nez, sinon je l'aurai pris dans la gueule », à la vue des capacités physiques des joueurs d'aujourd'hui, il y a fort à parier que même un aussi beau nez n'aurait pas suffit à amortir le choc.  

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